Succession de CTT sans respect du délai de carence

La Cour de cassation a rappelé les conséquences lorsque l’entreprise de travail temporaire conclut des contrats de mission successifs pour accroissement temporaire d’activité sans respecter le délai de carence.

À l’issue d’un contrat de mission (ou contrat de travail temporaire ̶− CTT) pour accroissement temporaire d’activité, l’entreprise de travail temporaire (ETT) ne peut pas conclure avec le même salarié un nouveau CDD ou CTT pour pourvoir le même poste avant l’expiration d’un délai de carence. Ce délai de carence est égal, sauf convention ou accord de branche étendu de l’entreprise utilisatrice prévoyant des dispositions différentes, :

  • au 1/3 de la durée du contrat de mission venu à expiration si la durée du contrat (comprenant son ou ses renouvellements) est de 14 jours ou plus ;
  • ou à la moitié de la durée du contrat de mission venu à expiration si la durée du contrat (renouvellements compris) est inférieure à 14 jours (C. trav. art. L 1251-36, L 1251-36-1 et L 1251-37).

En cas de non-respect de ce délai, les CTT et CDD sont requalifiés en contrat à durée indéterminée (CDI).

Dans un arrêt du 15-1-2025, la Cour de cassation a rappelé sa position en cas de litige portant sur le non-respect par l’ETT du délai de carence entre des CTT successifs.

CTT successifs pour accroissement temporaire d’activité. Un salarié a été mis à la disposition d’une société par son ETT par 15 contrats de mission successifs pour accroissement temporaire d’activité. Ensuite, il est embauché en CDD par l’entreprise utilisatrice pour le même motif.

Victime d’un accident du travail au début de son CDD, il a été licencié et a saisi le juge prud’homal pour demander la requalification des contrats de mission et du CDD en CDI auprès de l’entreprise utilisatrice et obtenir le paiement d’indemnités liées à la requalification de la part de l’ETT et de l’entreprise utilisatrice. En appel, les juges ont rejeté ses demandes au motif que le non-respect des délais de carence ne constitue nullement une cause de requalification des contrats de mission en un CDI.

Le salarié a formé un pourvoi en se fondant sur l’article L 1251-40 du Code du travail qui prévoit que lorsqu’une entreprise utilisatrice a recours à un salarié temporaire en ne respectant pas les dispositions légales concernant les cas de recours, la fixation et l’échéance du terme ainsi que la durée du contrat de mission, ce salarié peut demander auprès de l’entreprise utilisatrice la requalification de ses contrats de mission en CDI, prenant effet au premier jour de sa mission.

Respect d’un délai de carence par l’ETT entre deux CTT pour accroissement temporaire d’activité. La Cour de cassation a censuré la décision des juges. Elle a déclaré que les contrats de mission établis par l’ETT mentionnaient le motif d’un accroissement temporaire d’activité et n’avaient pas été conclus pour la réalisation de travaux urgents nécessités par des mesures de sécurité. En conséquence, le respect du délai de carence s’imposait à l’ETT, et faute pour celle-ci de l’avoir observé, elle avait failli à ses obligations qui lui étaient propres. Le salarié était donc légitime à demander la requalification de ses contrats de mission en CDI auprès de l’ETT. En revanche, il ne pouvait pas se fonder sur l’article L 1251-40 du Code du travail pour obtenir la requalification de ses contrats de mission en CDI auprès de l’entreprise utilisatrice, car cet article ne vise pas le non-respect du délai de carence par l’entreprise utilisatrice.

 

Source : Cass. soc. 15-1-2025 n° 23-20.168

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